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Le répertoire d'idées permettant d'exploiter la pleine puissance de l'information et de la connaissance dans le management des opérations industrielles et institutionnelles


Ammar Hadj Messaoud, Ing.; M.SC.

Les images, métaphores, des entreprises et des institutions

Les gestionnaires et les professionnels efficaces de tous les horizons doivent maîtriser l’art de « lire » les situations qu’ils tentent d’organiser ou de gérer. Cette compétence se développe généralement comme un processus intuitif, appris par l’expérience et la capacité naturelle. Même si, parfois, une personne peut effectivement déclarer qu’elle a besoin de « lire ce qui se passe dans une situation particulière » ou de « maîtriser un problème particulier », le processus de lecture et de relecture se déroule souvent à un niveau presque subconscient. Pour cette raison, on pense souvent que des gestionnaires efficaces et des personnes qui résolvent des problèmes sont nés plutôt que créés et ont un pouvoir magique pour comprendre et transformer les situations qu’ils rencontrent.

Cependant, si on examine plus en détail les processus utilisés, on constate que ce type de mystique et de pouvoir repose souvent sur une capacité à développer une profonde appréciation des situations à traiter. Les dirigeants et les gestionnaires compétents développent le talent de situations de lecture en pensant à différents scénarios et de forger des actions qui semblent appropriées aux compréhensions ainsi obtenues.

Ils ont la capacité de rester ouverts et flexibles, en suspendant les jugements immédiats chaque fois que possible, jusqu’à ce qu’une vision plus complète de la situation apparaisse. Ils sont conscients que de nouvelles perspectives apparaissent souvent lorsque l’on aborde les situations sous «de nouveaux angles» et qu’une lecture large et variée peut créer un large éventail de possibilités d’action. Les gestionnaires moins efficaces et ceux qui résolvent les problèmes semblent toutefois tout interpréter d’un point de vue figé. En conséquence, ils rentrent souvent dans des murs, ils ne peuvent pas se transformer et évoluer ; leurs actions et leurs comportements sont souvent rigides et inflexibles.

Il faut explorer et développer l’art de lire et de comprendre la vie organisationnelle. Elle repose sur un principe très simple : toutes les théories des organisations et de gestion reposent sur des images ou métaphores implicites qui nous conduisent à voir, à comprendre et à gérer des organisations de manière distincte mais partielle.

La métaphore est souvent considérée comme un moyen d’embellir le discours, mais sa signification est bien plus grande que cela. L’utilisation de la métaphore implique une façon de penser et une façon de voir qui imprègnent comment on comprend notre monde en général. Par exemple, des recherches dans une grande variété de domaines ont montré que la métaphore exerçait une influence déterminante sur la science, notre langue et notre façon de penser, ainsi que sur la façon dont on s’exprime au quotidien.

On utilise la métaphore chaque fois que l’on essaye de comprendre un élément de l’expérience en termes d’un autre. Ainsi, la métaphore procède par des assertions implicites ou explicites. Un des aspects intéressants de la métaphore est qu’elle produit toujours ce type de vision unilatérale. En soulignant certaines interprétations, cela tend à forcer les autres à jouer un rôle de fond. Ainsi, quand on dit « cet homme et comme un lion » on attire l’attention sur la bravoure, la force ou la férocité du lion, la métaphore dissimule le fait que la même personne peut aussi bien être un cochon, un diable, un saint, un ennemi ou un solitaire. Une autre caractéristique intéressante réside dans le fait que la métaphore crée toujours des distorsions. La métaphore utilise des images évocatrices pour créer ce que l’on peut qualifier de «faussetés constructives», qui, prises à la lettre ou à l’extrême, deviennent absurdes.

Lorsqu’on aborde la métaphore de cette manière, on constate que le simple postulat selon lequel toute théorie est une métaphore a des conséquences d’une portée considérable. On doit accepter que toute théorie ou perspective qu’on apporte à l’étude de l’organisation et de la gestion, tout en étant capable de générer des informations précieuses, soit également incomplète, partiale et potentiellement trompeuse.

Les interprétations des entreprises et des organisations sont toujours basées sur une sorte de théorie pour expliquer la réalité. De nombreuses idées sur les entreprises, les organisations et la gestion sont basées sur un petit nombre de croyances et d’hypothèses données. Les entreprises et les organisations sont complexes et peuvent être comprises sous plusieurs angles. Ceux qui sont inflexibles ne voient les entreprises et les institutions que selon l’une de ces métaphores, mais ceux qui sont ouverts et flexibles et qui suspendent leur jugement sont capables de reconnaître plusieurs perspectives, qui en ouvrent plusieurs plutôt qu’une seule possibilité pour traiter les organisations et leurs problèmes. On vit dans un monde de plus en plus complexe et on gère la complexité en l’ignorant. On peut identifier huit perspectives organisationnelles :

  1. L’entreprise ou l’institution vue comme une machine : la vision de la machine qui domine la pensée de la gestion moderne et qui est typique des bureaucraties et du taylorisme ;
  2. L’entreprise ou l’institution vue comme un organisme : la vision organique, systémique, qui met l’accent sur la croissance, l’adaptation et les relations environnementales ;
  3. L’entreprise ou l’institution vue comme un cerveau : les organisations en tant que processeurs d’information capables d’apprendre ;
  4. L’entreprise ou l’institution vue comme une culture : les organisations en tant que cultures fondées sur des valeurs, des normes, des croyances, des rituels, etc. ;
  5. L’entreprise ou l’institution vue comme un système politique : dans les organisations politiques, ce sont les conflits et le pouvoir qui prédominent ;
  6. L’entreprise ou l’institution vue comme une prison du psychisme : certaines organisations sont des prisons psychiques dans lesquelles les gens sont pris au piège de leur état d’esprit ;
  7. L’entreprise ou l’institution vue comme flux et transformation : les organisations peuvent s’adapter et changer ; et
  8. L’entreprise ou l’institution vue comme instrument de domination : certaines organisations sont des instruments de domination mettant l’accent sur l’exploitation et imposant sa volonté à d’autres.

Si on considère l’idée populaire selon laquelle « l’entreprise, ou l’institution, est une machine ». La métaphore peut créer des informations précieuses sur la manière dont une entreprise, ou une institution, est structurée pour obtenir des résultats prédéterminés. Mais la métaphore est incomplète car elle ignore les aspects humains. La métaphore est biaisée car cela augmente l’importance des dimensions rationnelle et structurelle. La métaphore est trompeuse car l’entreprise, ou l’institution, n’est pas une machine et ne peut jamais être réellement conçue, structurée et contrôlée comme un ensemble de parties inanimées.

La métaphore est intrinsèquement paradoxale. Cela peut créer des idées puissantes qui deviennent également des distorsions, car la manière de voir créée par une métaphore devient une manière de ne pas voir. Cependant, lorsqu’on reconnaît cela, on peut commencer à mobiliser le véritable pouvoir de la métaphore et son rôle dans le management. En reconnaissant la théorie comme métaphore, on comprend rapidement qu’aucune théorie ne nous donnera jamais un point de vue parfait ou polyvalent. On doit être conscient que le défi consiste à maîtriser la métaphore : trouver de nouvelles façons de voir, de comprendre et de façonner les situations qu’on veut organiser et gérer. Pour ce faire, il faut comprendre comment cela peut être réalisé en explorant les implications de différentes métaphores pour réfléchir à la nature de l’entreprise ou de l’institution. Certaines des métaphores, ou des vues, font appel à des modes de pensée familiers ; d’autres développent des idées et des perspectives qui seront plutôt nouvelles. Ensemble, elles montrent comment on peut utiliser la métaphore pour générer un éventail d’idées complémentaires et concurrentes et pour apprendre à exploiter les points forts de différents points de vue.

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